À mon entrée à l’Université, à l’âge de dix-neuf ans, j’avais encore l’esprit philistin; je ne savais m’exprimer que par des discours et une prose parsemés de solécismes et de barbarismes. Heureusement, ce petit carnet noir, communément nommé Glossaire pour tirer au clair les discours universitaires, m’a apporté le viatique nécessaire.
Ce projet est né d’une lubie ayant atteint mon esprit au début de ma formation à l’Université de Montréal; une microsociété qui me paraissait de prime abord hermétique et dont les acteurs s’exprimaient dans une langue qui m’était peu familière, voire incompréhensible par moments. Face à cette réalité dans laquelle je m’étais volontairement immergé, je décidai sans plus tarder de pencher à l’écrit un glossaire dans lequel se retrouveraient les substantifs, épithètes et prédicats qui m’étaient jusqu’alors d’un abord délicat.
Cette période de ma vie étant dédiée à la redécouverte de ma langue maternelle, dont je ne maitrisais, il va sans dire, que partiellement, m’a poussé à explorer les ramifications de la linguistique française, dont la pérégrination à travers le latin classique et le français médiéval. À cet effet, en plus d’intégrer à mon glossaire la définition des termes bizarroïdes lus ou entendus, j’ajoutais, pour chaque nouvelle entrée, une rubrique dédiée à l’étymologie. Qui plus est, pour m’assurer que je comprenais bien le sens parfois plurivoque d’un terme, je faisais appel à un exercice bien connu en mnémotechnique, à savoir la rédaction d’une phrase mnémonique dans laquelle ledit terme pourrait s’employer congrûment.
Lorsque j’ai entamé le projet, il m’arrivait parfois d’intégrer plus de cinq expressions par jour, desquels on peut noter des vocables aussi élémentaires que « ire », « jalon », « mire » et « adéquation ». Cette activité est d’autant plus fascinante d’un point de vue archivistique, car chaque trouvaille possède sa propre historicité. En ce sens, il m’est possible de vous indiquer que le vocable « ire » a été trouvé dans un article de presse écrite, que le terme « jalon » provient du discours d’un chargé de cours, que le mot « mire » m’a été dévoilé par mon frère aîné et que le substantif « adéquation » a été utilisé par un professeur à l’École de bibliothéconomie et des sciences de l’information.
Après maintenant plus de dix mois de rédaction, l’élargissement de mon vocabulaire qui en a résulté, autant à l’écrit qu’à l’oral, est éloquent. Ainsi, en plus d’avoir acquis un niveau langagier plus élevé que la rudimentaire littératie, ce petit carnet m’a permis de répudier l’ignorance au profit de la connaissance.
Hugo Vaillancourt Chapdelaine
Pour s’assurer que ce texte si habilement présenté et à l’éloquence si bien développée soit apprécié à sa juste valeur, je suggérerais que soit fournit, en annexe à celui-ci, une copie de votre glossaire. 🙂
Excellent texte Hugo et très belle initiative!